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L’un des objectifs est de rendre cet espace de plus en plus vert, tout en développant l’offre touristique.

Avec ses 43 hectares et ses quelque 4 000 arbres, massifs arbustifs et ses nombreuses allées enherbées, le cimetière du Père-Lachaise, situé dans le 20e arrondissement, est un des poumons de la capitale. L’un des objectifs est de rendre cet espace de plus en plus vert, tout en développant l’offre touristique.

Après des décennies, où les équipes s’engageaient à rendre les espaces « propres » à coups de produits phytosanitaires, depuis 2 015  le point de bascule s’est opéré aussi au Père-Lachaise, son visage se transformant à vue d’œil, la vie reprenant ses droits, se rappelle le conservateur Benoît Gallot dans son ouvrage La vie secrète d’un cimetière.

Érables, frênes, chênes, platanes, thuyas, tilleuls : aujourd’hui, plus de 4 000 arbres de plus de 80 essences donnent vie à la nécropole. Mais ce n’est qu’un début. L’un des objectifs des équipes du cimetière du Père-Lachaise est de favoriser la biodiversité et la vie sauvage. Et cela passe notamment par l’enherbement, explique-t-il.

« À l’origine, le Père-Lachaise était très vert. Il a été construit comme un cimetière promenade. Victime de son succès au XIXe siècle, la végétation a décru pour laisser place aux tombes. Aujourd’hui, on essaye de remettre beaucoup de végétation.

Sur les 43 hectares du Père-Lachaise, il y a treize hectares de cheminements qu’on pourrait enherber, où il y a déjà des massifs : C’est quand même important ! Ceux-ci sont déjà en partie enherbés, soit spontanément soit parce qu’on a déjà fait des travaux d’enherbement, mais il nous en reste encore beaucoup. » Et le conservateur de poursuivre : « Les fossoyeurs retirent chaque semaine des dalles en ciment dans les chemins, que les familles avaient été autorisées à poser il y a 50 ans, par exemple, afin d’enherber ces espaces et de favoriser aussi l’imperméabilité des sols.

« À l’origine, le Père-Lachaise était très vert. Il a été construit comme un cimetière promenade. Victime de son succès au XIXe siècle, la végétation a décru pour laisser place aux tombes. » Benoît Gallot.

Il y a des endroits comme les trottoirs ou certaines divisions où le sol est très peu riche, et où ça ne pousse pas ou que très lentement. Des jardiniers vont intervenir pour favoriser la pousse. » Certaines zones sont laissées en jachère. « On voit alors un petit chemin naturel qui se crée et où l’herbe a poussé. »

Si les équipes continuent de tondre aux bords des sépultures pour permettre aux familles d’y accéder, le reste est laissé en friche jusqu’à la Toussaint. « On y voit ainsi s’y développer beaucoup de fleurs et les insectes, papillons et abeilles en profitent. »

Mais le travail ne fait que commencer. « On est loin d’avoir fini d’enherber toutes les allées, les cheminements et d’avoir retiré tout le ciment dans les allées. C’est un travail qui s’étale sur plusieurs années, en fonction du budget. Il faudra sûrement au moins une décennie pour qu’on puisse dire que toutes les allées et trottoirs du Père-Lachaise sont enherbés, mais c’est l’objectif à long terme. On voit que l’homme a besoin de nature. Celle-ci joue un rôle d’apaisement important. »

Alors que certains arbres, marqués de rouge, sont en cours d’abattage, ceux-ci seront remplacés, souligne-t-il. « Certains ont 150 ans ou sont attaqués par un champignon ; on ne peut pas se permettre qu’un arbre tombe sur les usagers ou les tombes. »

UN SITE QUI VIT

Du côté du patrimoine, les équipes s’activent également à garder les lieux en état, face aux vagues de visiteurs. « On a environ 7 500 personnes par jour au Père-Lachaise, à 3 000 quand il pleut. Certains dimanches, ce chiffre monte à 15 000. »

Un travail au quotidien. « C’est un site qui vit et qu’il faut entretenir. On a refait des escaliers qui étaient très abîmés, ce qui est essentiel puisque des milliers de personnes y passent tous les jours ; on refait les voiries.. On aimerait, également, restaurer de vieilles chapelles ou encore les abords de la tombe de Jim Morrison. » Quant aux nouveaux monuments funéraires, ceux-ci doivent respecter l’avis de l’architecte des Bâtiments de France. « Tout est protégé. Il y a quatorze monuments classés au titre des monuments historiques comme ceux de la Fontaine et de Molière. » Certaines chapelles à l’abandon ont été restaurées pour être emménagées en columbarium.

Outre l’exploitation funéraire, les équipes s’efforcent de préserver le patrimoine existant, tout en renforçant la végétalisation des lieux. « Il faut trouver le juste équilibre pour ne pas dénaturer les lieux, ni en faire un musée ou trop vouloir le végétaliser. L’objectif est de le faire évoluer tout en préservant son côté pittoresque qui fait son charme, souligne-t-il. Ce qui est particulier dans la fonction, c’est que quand on plante un arbre aujourd’hui, ce sont nos héritiers qui en bénéficieront dans 70 ans. J’aime l’idée que ces décisions s’inscrivent dans le temps. »

DE NOUVELLES SIGNALÉTIQUES

Bien plus à court terme, un autre projet est en marche pour aider les touristes à (mieux) trouver leur chemin. « On est très impliqué dans la refonte de la signalétique, avec les services de l’État, afin de mieux orienter les usagers au sein du cimetière. » Évidemment, les panneaux signalétiques en fonte actuels seront maintenus, rassure-t-il. « Il est hors de question de les changer. Des panneaux d’orientation un peu plus moderne, mais se fondant discrètement dans le paysage, seront ajoutés. » Car si le charme du Père-Lachaise tient également à son aspect labyrinthique, certains emplacements comme celui de la Chapelle de l’Est pourraient être mieux renseignés, tout comme les toilettes ou, tout simplement, les sorties qui ne sont pas indiquées. « Les touristes se perdent souvent et ne trouvent pas toujours la sortie. » Cette nouvelle signalétique est attendue pour 2 025.

« On a environ 7 500 personnes par jour au Père-Lachaise, à 3 000 quand il pleut. Certains dimanches, ce nombre augmente à 15 000. L’enjeu est de concilier les besoins du public funéraire avec ceux du public touristique. » Benoît Gallot

BIENTÔT UNE APPLICATION DE LA VILLE DE PARIS POUR DÉCOUVRIR LES LIEUX

Pour découvrir le Père-Lachaise, il y a évidemment les visites guidées, mais il est aussi tout à fait possible de flâner à votre rythme en utilisant la carte des lieux en version papier (distribuée gratuitement dans un kiosque d’accueil touristique, du côté du métro du Père-Lachaise, en haute saison) ou en version PDF via son smartphone, ainsi que via quelques applications mobiles du privé comme Super Lachaise, Secret de Paris, Paris Guide Monument Tracker… Mais d’ici un an, une nouvelle application mobile développée par la Ville de Paris devrait voir le jour, annonce le conservateur Benoît Gallot. « On est au tout début, mais des groupes de travail sont en train de la développer. » Objectif : améliorer l’expérience des touristes, à l’aide de code QR, tout en permettant aux membres du personnel d’être moins sollicités par les chercheurs de tombes. « Cette application permettrait aux touristes d’être géolocalisés pour trouver plus facilement les tombes d’Edith Piaf, d’Oscar Wilde ou de Jim Morrison. Cette application mobile contiendrait aussi des informations sur le cimetière, son histoire, les tombes remarquables. Des parcours seront proposés sur les femmes célèbres, les inventeurs régionaux, les écrivains etc. » De quoi planifier et organiser sa balade pour explorer tranquillement les lieux et gagner du temps. En attendant, si vous êtes perdu, pas d’inquiétude : des habitués, autoqualifiés de « pèrelachaisiens », occupent une bonne partie de leur temps libre au cimetière et aident avec plaisir les touristes égarés en leur indiquant le chemin pour rejoindre les tombes recherchées. Ils repèrent d’ailleurs très vite ceux qui en ont besoin. « Vous cherchez la tombe de Chopin ? C’est ici à droite ! » Le tout avec le sourire. Mieux que Google Maps, n’est-ce pas ?