Dire adieu n’a jamais été simple. Mais aujourd’hui, la manière même de faire nos adieux est en train de changer radicalement. Le dernier souffle que nous laissons derrière nous n’a plus forcément besoin de pierre tombale ni de fleurs fanées sur une sépulture nettoyée une fois l’année. De plus en plus de familles choisissent la crémation, un adieu avec ou sans monument, mais plus que jamais empreint de signification profonde. En Belgique, comme ailleurs en Europe, la crémation devient la nouvelle norme : 68 % des Belges choisissent cette pratique funéraire. Et derrière ce choix, qui peut sembler avant tout pratique, se cache en réalité une mutation profonde de notre rapport à la mort et au souvenir.
REFLET DE L’ÉVOLUTION DES MENTALITÉS
Car non, la crémation n’est pas simplement un acte funéraire. Elle est le reflet d’une société qui, doucement mais sûrement, change de paradigme. Nos morts ne sont plus figés dans le marbre ; ils continuent à exister ici et là, dans des urnes, placées dans des columbariums, sous des végétaux voire les cendres dispersées au gré des vents et des flots. Pour certains, cet adieu semble plus fluide, presque intime et répond à un besoin croissant de personnalisation, de réinvention ; une manière aussi d’alléger le poids des traditions. Alors que la crémation réinvente l’adieu, c’est aussi la mémoire qui semble se redéfinir. Comme pour mieux vivre l’absence, les vivants créent des espaces de recueillement à l’image du défunt, à la fois réels et virtuels. Alors, comment en est-on arrivé là ? Quels sont les chiffres, les histoires humaines derrière cette tendance qui touche désormais 53,68 % des funérailles en Région wallonne. Que peut-on faire réellement de ces cendres, une fois les flammes éteintes ? Et pourquoi ce geste, si intime, est-il devenu un véritable miroir des mutations sociétales ?
DANS LES COULISSES D’UNE FABRIQUE DE CERCUEILS
À travers ce dossier, nous vous emmènerons aussi dans les coulisses d’une fabrique de cercueils, chez Funico, où la moitié des cercueils belges sont fabriqués, pour un plongeon plus technique dans les tendances funéraires actuelles, où l’écologie et la simplicité se reflètent à travers les designs des dernières demeures. Car c’est là où prennent vie ces derniers écrins que, paradoxalement, un nombre croissant de défunts n’habitera que quelques jours – comme une barque emmenant les âmes de l’autre côté du fleuve.
RENCONTRE AVEC UN MAÎTRE DE CÉRÉMONIE
C’est d’ailleurs comme un passeur, mais pour les vivants, que se voit Jean-Benoît Page, maître de cérémonie au Crématorium de Ciney. « Ce qu’on fait ici, c’est avant tout pour ceux qui restent. » Eux qui tissent les derniers liens entre les vivants et les disparus, doivent trouver les mots justes pour accompagner ces derniers moments. UN ADIEU AUSSI À NOS ANIMAUX Au-delà des hommes, ce sont aussi nos animaux de compagnie qui ont désormais droit à un adieu digne. Le crématorium Pro Animali, illustre cette nouvelle tendance : un dernier hommage pour ces fidèles compagnons. TROUVER LES BONS MOTS Évidemment, la mort n’est pas seulement une question de cendres et de cercueils. Car pour ceux qui restent, il faut savoir trouver les mots. Des mots juste pour parler de la mort aux enfants, pour les aider à apprivoiser l’absence. Des mots pour comprendre un deuil qui prend des formes multiples, parfois aussi difficiles à porter et à surmonter. Au-delà de la simple statistique, au-delà des chiffres en hausse, ce dossier se penche sur cette réinvention de l’adieu, et sur la manière dont, face à la mort, nous nous réinventons tous, en tant que société. Un adieu parfois plus libre, souvent plus personnel et personnalisé, mais dans tous les cas toujours profondément chargé de sens.